L’Awalé est un jeu de stratégie séculaire au milles vertus, sur les aspects intellectuel, moral et socio-culturel.
L'Awalé participe au développement intellectuel de ses pratiquants:
-il se joue dès 5 ans et permet aux jeunes comme aux séniors de muscler au quotidien mémoire, logique, anticipation, concentration, planification/exécution et abstraction;
-c'est une ressource académique qui démystifie ludiquement les mathématiques et la rhétorique. De nombreux concepts mathématiques y sont abordés avec légèreté (addition/soustraction, dénombrement, congruence, symétries, figures géométriques). L'apprenant doit imaginer toutes les éventualités, formuler des hypothèses, apprécier leur évolution, justifier ses choix à l'aide d'un raisonnement logique, l'articuler au moins de façon abstraite.
Les jeux de stratégie par essence sont des jeux de guerre (stratégie vient du grec Stratos/armée et Agéin/diriger). Toutefois, l'Awalé est le seul qui y apporte modération et morale:
-égalité: pas de distinction de couleur/forme des pions, donc pas de hiérarchie figée, pas de discrimination;
-solidarité: interdiction d'affamer son adversaire, obligation de le nourrir s'il s'affame
-patience et endurance sont encouragées, car les tactiques les plus impactantes les nécessitent;
-L'union des pions fait leur force et la défaillance d'un peut susciter la perte de plusieurs.
Au delà des vertus morales qui apparaissent trivialement dans ses règles, un instructeur éclairé peut facilement faire le parallèle entre les différentes situations du jeu avec les situations de vie. L'Awalé se transforme donc en espace de vie virtuel où l'apprenant peut apprendre de ses erreurs, peut capitaliser sur cet apprentissage dans la vie réelle.
Autres particularités du jeu de stratégie Awalé, socio-culturelles notamment:
-il se joue dans la rue. Il est donc ouvert et accessible à tout.e.s. La moindre partie est un divertissement public animé, où les belligérants se taquinent verbalement, les spectateurs s'improvisent commentateurs...
-toutes les couches sociales le pratiquaient dans le temps, autant les rois sur des tabliers en or massif, que le peuple sur du bois, de la pierre ou dans des trous creusés à même le sol. Aujourd'hui quoique délaissé par les classes nanties, il reste apprécié par les dockers, les taximans, les maçons, les techniciens... Bref, le jeu de stratégie populaire.
-c'est aussi le jeu aux multiples usages sociaux. Chez certaines tribus Akan, il servait à désigner le roi au terme d'un tournoi entre les princes. Aux Antilles, on en joue lors des veillées funèbres pour accompagner le défunt à sa dernière demeure. Il y a été aussi un élément de résistance/cohésion culturelle des africains déportés dans ces sociétés jadis esclavagistes, au même titre que la capoéira, le vaudou et la santeria.
Autant d'arguments qui font de l'Awalé un jeu de stratégie, de sagesse et de sociabilisation, digne d'être partagé au maximum. Et à l'ère du tout numérique, il peut être opportun d'utiliser les NTIC pour faciliter sa diffusion. L'état des lieux présente une panoplie d'applications et de plateformes où il est possible de faire des parties contre une intelligence artificielle ou contre d'autres joueurs en distanciel. Vigilance toutefois à cette dématérialisation qui pourrait dégarnir les vertus de l'Awalé. On notera par exemple des joueurs jouant sous anonymat, rivés sur le jeu, sans échange avec l'adversaire ou les spectateurs virtuels. D'autres qui refusent de jouer contre leurs confrères moins talentueux. L'Awalé dans ces espaces numériques se réduit à une série de cercles où on suit les règles, enchaîne les victoires et les défaites. Comment donc promouvoir l'Awalé via les NTIC sans en perdre les vertus?
-Doter les plateformes et applications d'outils qui facilitent les interactions. C'est déjà le cas de nombreux jeux vidéo, où les joueurs sont en vidéoconférence. Y ajouter des fonctionnalités comme la création d'avatars, des messageries instantanées, des partages de parties, des visualisations de parties sur une base de données régulièrement mise à jour...
-Proposer aux utilisateurs une immersion numérique dans un univers culturel riche. Comme le fait déjà l'application Kissoro (homologue de l'Awalé en Centrafrique) du studio Masseka Games; le joueur doit remporter des parties afin de mettre fin à une guerre qui ronge deux royaumes voisins. Il affronte des adversaires ayant des avatars, des costumes, sur des territoires variés. Ou encore Assassin's creed Origins du studio Ubisoft où le joueur évolue en 3D dans l'Egypte pharaonique, avec des appartés historiques, des explications...Une véritable ballade instructive, réaliste tout en jouant.
-Imaginer des applications de rencontres, de véritables Tinder de l'Awalé pour rassembler en présentiel les joueurs en privé comme lors d'événements publics (tournois, afterworks, brunchs...).
Les solutions techniques existent déjà. Pour ce faire, il faudrait un marché qui accepte d'assumer le coût de ces dotations. Le défi est donc davantage économique et publicitaire avec l’avènement de professionnels qui montrent au public en quoi l’awalé peut leur apporter de la valeur ajoutée. Où en est cette professionnalisation?
To be continued...
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